La Lettre n°211 de Septembre 2023
Actualités : Le Vernimmen 2024 est paru
Comme chaque année le Vernimmen s'ouvre par un texte introductif d’actualité où nous exposons nos vues, cette année : C’est quand la marée monte que l’on mesure la solidité des digues, où nous analysons les conséquences pour les entreprises de la hausse des taux d’intérêt ; à la fois pour les entreprises établies qui ont bénéficié du retard à l’allumage des banques centrales (pour changer leur politique monétaire afin de lutter contre l’inflation), pour mettre en place des couvertures contre la hausse des taux pour celles qui ne l’avaient fait ; pour les start-ups pour qui la hausse des taux s’est traduite par moins d’argent plutôt que par de l’argent plus cher. Par ailleurs, nous décortiquons les cas de Casino, Orpéa, et SVB pour en tirer des enseignements.
Nous vous laissons découvrir ce texte.
Outre dans l’avant-propos, nous avons bien sûr consacré à ce phénomène des développements à travers les chapitres concernés.
Naturellement, nous avons fait notre travail habituel de mise à jour pour vous offrir un outil de travail au quotidien aussi précis, fiable et exhaustif et pertinent que possible, intégrant :
- les nouvelles dispositions financières, boursières, juridiques, comptables et fiscales ;
- l'ensemble des statistiques et graphiques actualisés présentant les données les plus récentes à juin 2023 (plus de 100 tableaux et graphiques) ;
- les derniers travaux de recherche ayant des applications pratiques.
C'est ainsi qu'entrent dans le Vernimmen 2024 les termes capital call facility, DAT, décret tertiaire, Saron, taxe interne carbone et quelques autres.
Comme tout classique, le Vernimmen vous offre des socles de savoir forgés par la pratique et enrichis par des réflexions conceptuelles, lesquelles ne vous laissent jamais désarmés face à un problème ou une situation financière :
- le plan type d'une analyse financière et d'une analyse boursière ;
- les outils de mesure de la création de valeur ;
- les techniques de placement des actions, des obligations, des crédits syndiqués ;
- etc.
Pour vous aider à mieux utiliser « votre Vernimmen», chaque chapitre se clôt par un résumé, des exercices (188 en tout) et des questions corrigées (817).
Nous avons utilisé le rabat de couverture pour présenter dans un lexique français-anglais-américain les principaux termes de la finance, ainsi qu'une antisèche (« le Vernimmen » résumé en une page !).
Tant en annexe que dans le corps du texte, de très nombreux graphiques et tableaux vous donnent des éléments de référence et de comparaison. Afin de vous aider à aller au-delà, si besoin, chaque chapitre est doté d'une bibliographie avec des conseils d'orientation vers des papiers de recherche fondamentale ou des articles de presse ou des livres. Enfin, l'index comprend près de 2 000 entrées.
Tant la version en ligne que la version iPad du Vernimmen vous offrent en plus :
- les podcasts de nos MOOC sur l'analyse financière ou l'évaluation des entreprises et de nos cours à HEC Paris (sur le LBO, les fusions-acquisitions, l'augmentation de capital, la structuration de la dette, etc.) ;
- la totalité (pour la version en ligne) ou la quasi-totalité (pour la version iPad) des archives de la Lettre vernimmen.net depuis son premier numéro de juin 2001 (soit 1800 pages environ),
- un glossaire de plus de 2 800 termes de la finance. Pour la version en ligne, nous réalisons à mi-année une actualisation et incluons les changements majeurs des réglementations comptables, fiscales, juridiques et boursières,
- les deux chapitres bonus consacrés à l'histoire de l'analyse financière et à la micro-économie financière.
Si vous disposez d'un iPad et souhaitez y intégrer le Vernimmen 2024 enrichi, cliquez ici.
Pour vous procurer l'édition papier du Vernimmen 2024, cliquez ici. Et si vous voulez aussi une dédicace personnalisée de notre part, c’est ici.
Naturellement les abonnés à la version électronique en ligne du Vernimmen (www.vernimmenenligne.net) disposent de la nouvelle édition 2024 depuis la mi-août. Si vous souhaitez les rejoindre, cliquez ici.
Les propriétaires du livre bénéficient de conditions tarifaires réduites pour s'abonner aussi à la version en ligne.
Et si vous voulez nous entendre présenter le Vernimmen, c’est ici
Nous vous souhaitons autant de plaisir à utiliser votre nouveau Vernimmen 2024 que nous en avons eu durant ces 700 heures nécessaires pour le créer !
Enfin, voici ce que certains de ses utilisateurs ont écrit sur le Vernimmen 2024 :
« Le Vernimmen, c’est le premier livre de finance que j’ai acheté quand je n’étais encore qu’étudiante. Ensuite, en tant qu’enseignante, il m’a beaucoup aidée dans la conception de mes cours. C’est vers lui que je me tourne à chaque fois que j’ai des questions. Ce livre a toutes les qualités requises : il est clair, bien structuré autour des grands thèmes de la finance et il concilie la théorie et la pratique. Il montre que la finance évolue avec les enjeux mondiaux. La problématique de financement des start-up, la RSE, les progrès en ingénierie financière sont autant d'exemples qui témoignent de l’intérêt des auteurs pour les préoccupations de l’entreprise. »
Lamia Bouattour
Enseignant-chercheur à l’ESSEC de Tunis.
« Le Vernimmen est un ouvrage complet dont on ne prend la mesure de son utilité qu'avec les années, lorsqu'en tant que professionnel, nous avons besoin d'accroître, de vérifier ou d’affiner nos idées. La disponibilité de ses auteurs à répondre à nos questions contribue encore plus à faire de cet ouvrage LA bible de la finance d'entreprise. »
Louis Guérin
Analyste en private equity chez Edmond de Rothschild.
«C’est une véritable bible et une légende.»
Hervé Hélias
Président du groupe Mazars
« Le Vernimmen est l'ouvrage de référence des personnes étudiant ou travaillant dans la finance mais également pour ceux qui s'y intéressent. Il est exhaustif tout en étant très pédagogique avec ses explications et exercices accessibles à tous. Les compléments sur le site web et les réseaux sociaux sont tout aussi appréciables, merci pour cette bible ! »
Ines Kabouya
Étudiante à HEC et Paris 1 Panthéon-Sorbonne
« Le Vernimmen, si riche et si limpide à la fois, est indispensable pour un financier. »
Caroline Marie-Jeanne
Maître de conférences à l’IAE d’Angers
« Certains livres ne vous quittent pas. Tout financier a un Vernimmen sur son bureau ou dans sa bibliothèque… et pas une semaine ne passe sans qu’il ne le consulte ! »
Henri Philippe
Associé chez Accuracy
« Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ; voilà la recette du succès du Vernimmen. Un équilibre bien trouvé entre la théorie et les cas concrets. Une marque, une référence toujours d’actualité. »
Alexandra Soto,
Associée gérant et chief operating officer du groupe Lazard
Actualités : Les tribulations d'une start-up
Manawa (initialement nommée Adrenaline Hunter) a été créée en 2015 par Maud Mathe et Philippe Bichet, deux jeunes entrepreneurs épaulés par Denis Fayolle, un « serial entrepreneur » (La Fourchette, ManoMano, Singulart…), pour développer une plateforme globale de réservation d’activités de sports extrêmes et de voyages d’aventure, manawa.com.
Le premier tour de financement réunit des parents, amis et des business angels dont vos serviteurs, qui apportent 0,6 M€ (sur la base d’une valorisation pre-money de 2 M€). La dilution des fondateurs n’est que de 23 % grâce à un goodwill très important puisque les fondateurs n’ont alors apporté que 0,15 M€. Cette situation s’explique, outre par la qualité des entrepreneurs, par le travail fait en amont par les fondateurs sur l’analyse du marché et les solutions techniques pour l’adresser.
Le site est effectivement lancé en mai 2016 et la croissance est au rendez-vous durant les premières années, mais c’est au prix d’investissements importants (publicité, recherche de partenaires pour alimenter le site, création de contenus pour attirer les visiteurs). Le cash burn est donc supérieur à celui anticipé dans le plan d’affaires initial ; aussi une levée complémentaire est-elle réalisée auprès des actionnaires pour 0,5 M€ début 2017.
Une première « vraie » augmentation de capital (série A) de 2 M€ intervient fin 2017, voyant l’entrée du fonds tourisme de Bpifrance et d’un fonds de corporate venture allemand (sur la base d’une valorisation de 6 M€).
Fin 2018, les principaux actionnaires souscrivent également à un bridge de 0,5 M€ (sous forme d’obligations convertibles), première tranche d’une augmentation de capital à venir. Début 2019, Manawa sonde des fonds de venture capital et les industriels à cet effet, mais l’appétit est mitigé, en attente d’une démonstration plus aboutie de la capacité de la société à atteindre son point mort. Afin de maximiser ses chances de réaliser cette nouvelle levée de fonds, le management fait le constat mi-2019 qu’il faut modifier le modèle économique pour aller chercher de la rentabilité au-delà de la croissance. Un ajustement de la taille de l’équipe est effectué avec le départ de 11 personnes, soit un quart des effectifs. En parallèle un nouveau bridge de 0,8 M€ est mis en place par les actionnaires. La fondatrice ne s’inscrit pas dans la suite de l’aventure et quitte l’entreprise.
La situation financière continue de se dégrader, et la cession de la société est alors envisagée. Le temps du fondateur restant est monopolisé par les tentatives de levée de fonds, puis la négociation de la cession. Malheureusement, les discussions très avancées avec un acquéreur industriel (plateforme de réservation d’activités en ville) achoppent au dernier moment. C’est la vie des affaires et des fusions et acquisitions, mais les conséquences pour une start-up sont beaucoup plus dramatiques que pour une entreprise déjà rentable et installée sur le marché. Tout le temps perdu dans les négociations avec une conviction d’aboutir rapproche dangereusement Manawa de l’épuisement du cash disponible.
Fin 2019, une levée de fonds de 0,4 M€ est réalisée en urgence pour sauver Manawa alors que ses ressources financières sont épuisées. Seuls quelques-uns des actionnaires, les plus impliqués dans le suivi de l’entreprise, sont prêts à réinvestir sur la base d’une valorisation symbolique. Ceux n’ayant pas souhaité suivre, comme le fonds de corporate venture allemand, ou seulement partiellement, comme Bpifrance, sont alors très fortement dilués. Le management profite de ce répit pour accélérer le pivot amorcé vers le point mort : nouveaux licenciements, fermeture de divisions déficitaires, ouverture de nouveaux canaux marketing rentables.
En 2020-21, alors que les actions mises en place commencent à porter leurs fruits, nouveau coup du sort, l’activité de la société est touchée de plein fouet par la crise de la Covid-19 (toutes les activités commercialisées ayant fermé provisoirement). Le management réagit rapidement en réduisant drastiquement les coûts. L’effectif n’est plus alors que d’une poignée de personnes assistées par quelques stagiaires. L’équipe fait preuve d’une grande flexibilité pour orienter les réservations vers les pays et les zones ouvertes au tourisme. Ces actions permettent à Manawa de survivre (contrairement à certains de ses concurrents). Grâce aux aides de l’État, notamment à un PGE, la société passe la crise et démontre très rapidement sa capacité de rebond.
Pragmatique, dans un environnement très compliqué pour le tourisme, le management décide fin 2021 de s’adosser à une société filiale de la Caisse des Dépôts pour pérenniser son activité. C’est la fin de l’aventure entrepreneuriale, mais pas celle de Manawa ni de son management qui, dans un nouveau contexte actionnarial, retrouve le chemin d’une forte croissance.
Cette aventure Manawa démontre qu’une start-up ne repose pas généralement sur une idée géniale, révolutionnaire, mais avant tout sur les qualités de ses managers (et de ses actionnaires). Au-delà des qualités de visionnaires, de meneurs d’hommes et d’animateurs d’équipe nécessaires à tout bon manager, il faut que les dirigeants d’une jeune pousse soient :
- Flexibles. Sachant faire pivoter rapidement la stratégie de l’entreprise. Le financement en place ne couvre souvent au mieux que quelques mois, les décisions doivent donc être rapides.
- Parfois durs. Nous avons été le témoin de nombre de jeunes pousses qui ont dû à un moment de leur développement réduire drastiquement la voilure et ainsi licencier une partie importante des effectifs. C’est une alors question de survie. Le management d’une start-up est certainement plus dur et intraitable que celui d’une PME classique. Il en est de même lorsque quelqu’un ne fait pas l’affaire ou lorsqu’il y a des dissensions dans l’équipe dirigeante ; les sentiments et les tergiversations n’ont pas de place ici.
- Persévérants. C’est une certitude, le business plan initial ne sera pas réalisé ! L’aventure entrepreneuriale est faite d’obstacles, de changements de stratégie et la réussite, quand elle est au rendez-vous, n’arrive généralement qu’après des années de galères à essayer différentes options.
- Solides. Après tout ce que l’on vient d’écrire, il est évident que la charge morale sur les managers est énorme. C’est tellement plus facile d’être salarié dans une grande entreprise ! Mais la satisfaction quand on réussit n’est pas la même…
Les actionnaires sont également un peu particuliers… En effet, ils investissent avant tout en réalisant un acte de foi. La due diligence est très limitée, la capacité d’évaluer le réalisme du business plan très réduite. Les actionnaires investissent donc avant tout sur une équipe de management. Rappelons que dans le domaine des start-ups, plus de 80 % des investissements sont des échecs, la rentabilité d’un portefeuille d’investissement est liée à la réussite d’un nombre limité d’aventures.
Et si maintenant, vous songez à réserver une activité de plein air que ce soit près de chez vous, en France ou à l’étranger, c’est par ici.
Tableau : À propos des scissions
Les scissions constituent un petit compartiment du marché des fusions-acquisitions avec 179 opérations dans le monde depuis 2012, pour une valeur totale d’un peu plus de 1 200 Md$ :
Tous les secteurs sont concernés :
avec une surpondération des secteurs traditionnels.
Mais la scission est essentiellement un phénomène américain :
On estime qu’entre l’annonce et la réalisation, 10,7 mois s’écoulent, et de notre expérience, au moins autant en préparation avant annonce. Ce qui explique que les coûts de l’opération ne sont pas négligeables, avec une médiane à 3 % de la valeur de l’entité scindée, qui connaît en moyenne une croissance de son activité dans les 2 années suivant l’opération de 4,7 % l’an, contre 0,4 % pour son ancienne maison-mère.
Recherche : De l'ESG dans l'ISR ? Pas aux Etats-Unis
Avec la collaboration de Simon Gueguen, enseignant-chercheur à CY Cergy Paris Université
L’investissement socialement responsable (ISR) s’est considérablement développé ces vingt dernières années, en raison principalement des préoccupations grandissantes des investisseurs pour la soutenabilité environnementale. Les investisseurs institutionnels qui pratiquent l’ISR s’engagent à privilégier les investissements dans les entreprises vertueuses selon les critères ESG (environnement, social, gouvernance). Les définitions précises de l’ISR et de l’ESG donnent lieu à débat, et la difficulté de passer de notions qualitatives à des données quantitatives rend discutables les systèmes de notation. Pour autant, les agences de notation ESG (visant les entreprises) et les codes de conduite ISR (pour les investisseurs institutionnels) se sont développés et commencent à faire autorité sur les marchés. L’article que nous présentons ce mois[1] montre que les investisseurs qui se prétendent ISR intègrent effectivement les critères ESG dans leurs choix de portefeuille un peu partout dans le monde (et notamment en Europe), mais pas aux Etats-Unis.
L’étude laisse de côté les questions de définitions, et se fonde sur les principes qui font autorité en la matière. Concernant l’ISR, une initiative mondiale a été engagée avec le support des Nations Unies en 2006. Il s’agit des Principes de l’Investissement Responsable[2] (PIR), un code de conduite signé par environ 4 000 fonds d’investissements dans le monde (données de l’étude à fin 2021). Les principes sont multiples, mais le principal (et désigné comme premier principe) est un engagement à favoriser les investissements dans les entreprises vertueuses en terme d’ESG. La vertu en la matière peut être mesurée de deux manières : la note ESG elle-même, ou l’amélioration de la note. Par exemple, peuvent être considérées comme vertueuses des entreprises opérant dans un secteur polluant mais qui s’engagent à réduire cette pollution. Pour ce qui est de la notation ESG, les auteurs ont utilisé des données fournies par trois institutions : Thomson Reuters, MSCI et Morningstar. Même s’il existe quelques écarts selon les instituts, les résultats obtenus sont les mêmes. Notons ainsi que, si les critères ESG sont discutables (la décarbonation étant le seul critère vraiment mesurable), les systèmes de notation tendent vers une forme de consensus de marché.
Les résultats sont sans ambiguïté. Si l’on exclut les fonds américains, les signataires des PIR ont un score ESG de portefeuille (reconstruit à partir des scores ESG pondérés des titres en portefeuille) supérieur à celui des non-signataires. L’écart est de 13 % d’un écart-type ; cela peut sembler modeste, mais il faut prendre conscience que cela porte sur des montants considérables (plus de 100 000 Md$ d’actifs). Cela donne une significativité économique forte. Surtout, ce score ESG est amélioré (de 14 % d’écart-type supplémentaires) après la signature du code de conduite, ce qui indique un engagement réel de la part des signataires.
Le plus grand intérêt de l’article porte sur ce qu’ils trouvent sur les fonds américains, à savoir… aucun effet. Les fonds signataires n’investissent pas plus en ESG que les non-signataires. Pire : le score moyen des signataires est (très légèrement) inférieur à celui des non-signataires ! Et la signature n’améliore aucunement leur score. Cela ressemble beaucoup à de l’écoblanchissement, et ce mot est lâché par les auteurs, sans toutefois être affirmatifs. Il y a là un terrain pour de futures recherches. Une explication juridique fondée sur l’opposition entre droit commun et droit civil ne tient pas, car l’effet est fort au Royaume-Uni. Deux idées (éventuellement complémentaires) sont suggérées. D’abord, la concurrence extrêmement forte entre les fonds américains, qui les pousseraient à s’afficher ISR pour des raisons commerciales, sans accepter les contraintes qui vont avec. Ensuite, la moindre maturité du marché américain (comparé notamment à l’Europe) sur la finance responsable. Les auteurs remarquent que beaucoup des fonds signataires américains se sont engagés sur la fin de la période d’étude. Peut-être ont-ils juste besoin d’un peu de temps pour comprendre qu’une signature ne suffit pas…
Q&R : Valeur d'une start-up et instruments dilutifs
Récemment, nous avons pu observer que certains fonds de venture capital valorisent une start-up ayant quelques années derrière elle en s’éloignant des standards habituellement utilisés pour valoriser les instruments dilutifs lors de l’évaluation d’une entreprise.
La pratique[1] consiste soit :
- À retirer la valeur des instruments dilutifs dans le passage de la valeur de l’actif économique à la valeur des capitaux propres ;
- A supposer que les instruments dilutifs dans la monnaie sont exercés et qu’avec les fonds ainsi obtenus, l’entreprise rachète une partie des actions nouvellement créés, le solde conduisant à sa hauteur à diluer la valeur par action ;
- Ou, dans la méthode du placement des fonds, à supposer que les fonds résultant de l’exercice produisent des produits financiers grossissant le résultat net, et réduisant la dilution du BPA due à l’augmentation du nombre d’actions en circulation.
On conviendra que la méthode du placement des fonds n’est pas appropriée à une situation où l’entreprise est encore en perte. Mais il reste deux méthodes qui nous paraissent intellectuellement plus honnêtes que de simplement majorer le nombre d’actions en circulation de celles pouvant résulter de l’exercice des instruments dilutifs, en faisant mine d’oublier les fonds apportés à l’entreprise que leur exercice suppose.
Ceci pénalise particulièrement la start-up qui vient de mettre récemment en place un plan de BSPCE, à un prix d’exercice proche de celui de la valeur. À titre illustratif, prenons une valeur des capitaux propres, avant prise en compte des instruments dilutifs de 1000, répartie entre 100 actions, soit 10 € par action. Il existe 10 BSPCE avec un prix d’exercice de 8 €. Leur exercice conduira l’entreprise à recevoir 80€, avec lesquels elle pourrait racheter 8 actions sur les 10 nouvellement créées, laissant un solde de 2 actions nouvelles, qui illustre le coût des BSCPE pour les actionnaires, et une valeur par action de 9,8€.
La méthode prétorienne de certains fonds conduit à une valeur de 1000/ (100 + 10) = 9,1 €, soit 7 % de moins dans cet exemple, ce qui n’est pas une différence totalement négligeable.
La garde prétorienne ayant été dissoute par Constantin en 313, il nous paraît être temps en 2023 de renoncer à ses méthodes. . .même pour des fonds qui, comparativement à d’autres fonds investissant à des stades plus avancés du développement de l’entreprise, ont un niveau de sophistication financière plus faible.
[1] Que vous pouvez réviser au chapitre 24 du Vernimmen.
Commentaire : Sur l'actualité financière, postés sur les pages Facebook et LinkedIn du Vernimmen
Régulièrement, nous publions sur les pages Facebook et LinkedIn du Vernimmen[1] des commentaires que nous inspire l’actualité financière. En voici quelques-uns :
Novo Nordisk : une illustration d'une des lois du point mort
La publication des résultats semestriels du groupe pharmaceutique danois Novo Nordisk illustre bien l’une des lois du point mort qui indique que plus l’entreprise est loin de son point mort, plus les résultats varient en ligne étroite avec le chiffre d’affaires.
Avec une marge d’exploitation au premier semestre 2023 de 45,4 %, Novo Nordisk est effectivement très éloigné de son point mort, probablement autour de 270 % au-dessus de ce dernier. Autrement dit, il faudrait que le chiffre d’affaires baisse de 73 % (sic) pour que le résultat d’exploitation s’annule, tout en supposant que les frais fixes restent fixes, ce qui est une hypothèse particulièrement conservatrice quand le chiffre d’affaires se réduit des trois quarts !
Au premier semestre, les ventes ont crû de 29 %, portées par les excellents résultats de ses médicaments contre l’obésité et le diabète. Le taux de croissance du résultat d’exploitation a été lui de 30 %, soit quasiment autant. Pour l’ensemble de l’année, Novo Nordisk annonce + 27 à + 33 % en ventes et + 31 % à + 37 % en résultat d’exploitation. Quand on est excellent, difficile d’être excellentissime !
Exor : La technique de l'enchère inversée en matière de rachat d’actions
Exor, société holding cotée qui regroupe les investissements de la famille Agnelli, a annoncé un rachat d’actions portant sur 5 % de son capital en utilisant la technique de l’enchère inversée pour 750 M€, et des rachats au fil de l’eau pour 250 M€.
Il est vrai que les sociétés holdings familiales d’investissement ne sont guère appréciées en ce moment en Bourse avec des décotes sur actif net réévalué (ANR) comprises entre 38 % (GBL) et 57 % (Peugeot Invest). Exor, dont la performance ces dernières années est la meilleure, présente une décote de 43 %. Pour un investisseur, ces véhicules qui permettent à des familles de jouer dans leurs participations un rôle plus important que celui auquel elles pourraient prétendre en se limitant à leurs propres fonds, sont peu attirantes, d’où la décote. Qui pensera qu'Exor gardera sa participation dans Ferrari ou la Juventus ou Stellantis uniquement sur des critères financiers, sans que l’attachement historique à des entreprises ne joue un rôle essentiel ?
L’annonce de ce rachat a été combiné avec celui d’une progression de l'ANR sur le premier semestre de 23 %, contre moitié moins pour l’indice boursier de référence. Il est donc difficile d’attribuer avec certitude la hausse de son cours de Bourse de 5 % ce jour-là à l’une ou l’autre de ces annonces. Nous pensons, pour une entreprise qui capitalise 20 Md€, que l'effet performance est le plus impactant. Cette opération qui va réduire l’ANR de 3 % environ, mais de 5 % le nombre d’actions en circulation, entraînera une progression de l’ANR par action de 2 % qui peut expliquer une partie de la hausse du cours de 5 %.
La technique de l’enchère inversée, plus rarement utilisée en Europe que la simple offre à prix fixe, veut simplement dire que les actionnaires intéressés à céder ainsi une partie de leurs actions indiqueront le prix auquel ils sont prêts à céder quelle quantité de titres, dans une fourchette comprise entre - 3 % et + 10 % du prix de marché. Exor fixera le prix à celui qui lui permettra de racheter 750 M€, en commençant par les prix les plus bas, d’où le terme d’enchères inversées.